• J’ai froid. Il pleut.

    Un peu mal dans la peau des autres. Un peu désenchantée parmi ces vies contées.

    Qui est cette enfant qui s’empare de mon corps?

    Qui sont ces autres que je ne peux aborder?

    J’ai froid. Il vente.

    Un peu mal à l’aise quand je suis autre. Un peu dispersée quand je perds mes mots.

    Qui sont ces hommes qui s’emparent de vos corps?

    Quel est ce moi que je ne peux décoder?

    J’ai froid. Il neige.

    Un peu déboussolée quand je perds le sud. Un peu maladroite quand je cisaille ma peau.

    Quel est ce monde dans lequel je végète?

    Qui sont ces hommes qui s’emparent de nos enveloppes corporelles?

    Quel est ce Temps qui m’emprisonne dans un cachot d’hypocrisie?

    Quelle est cette barre qui m’empêche d’être ce que l’on exige?

    Quels sont mes yeux, mes mains, mon âme?

    Qui sont-ils et qui suis-je?

    Un peu mal dans la peau des autres… Il pleut… Il neige… Il vente… Peu importe, c’est du pareil au même…


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  • Ma seizième comme ma quinzième année. Une barque emportée sur le ru de mon sang, ancrée dans la fertilité de ma chair. Et de m’y noyer comme tombent les cadavres. Et de n’en plus pouvoir comme s’installent les tombes. La pierre d’une ère nouvelle sur le tombeau de mon âme trop faiblement enivrée. Je ne saisis que trop bien pourquoi mes larmes coulent. Ma seizième comme ma quinzième année. 

    Et puis le vent de tourner. Ma barque de chavirer dans la noirceur d’un liquide sali par la labeur d’une journée d’hypocrisie. L’anniversaire de ma malédiction originelle. Comme la bouchée d’Adam. Comme la nudité des uns. Comme la morsure de l’autre. Ils n’avaient rien prévu quand s’imaginent les tombeaux. Ma seizième comme ma quinzième année.

    J’ai mal quand se lève le jour. Je pleure quand s’annonce l’heure d’un repas que je ne prends désormais plus. Je souffre quand arrive la solitude journalière d’un lit solitaire. Je brûle quand la floraison de délicieuses perles s’installent au coin de mes paupières. Je n’ai plus que ma barque emportée sur le ru de mon sang quand l’odeur de la vie ne me fait plus frémir. Et comme une vérité aveuglante : ma seizième comme ma quinzième année.

    L’éclosion d’une nouvelle sensation au creux de mon moi le plus profond, ô désirable sensation invoquée depuis tant de mois quand se succèdent les instants d’un rien dans la lenteur d’un tout! Je souris quand rougissent mes yeux, et mes oreilles me transpercent l’âme par la chaleur qui en émane. Il me semble que mon corps n’est plus qu’un rythme émotionnelle au fil de mon inatteignable fantasme. Il m’avait semblé un instant. Il m’était apparu une seizième comme ma quinzième année. Aujourd’hui, je vois bien comme mon erreur était incommensurable!

     

    Ma seizième comme prémisse de ma quinzième année. Si auparavant ma barque était emportée sur le ru de mon sang, c’est présentement mon poignet comme noyé par le liquide brunâtre qui s’échappe malicieusement de se vaine prisonnière, veine geôlière.

    Ma seizième et je n’entrevois plus ma dix-septième année.


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  • Dis moi

    Si l’on s’en ira

    Tous les deux, toi et moi

    Dis moi

    Si l’on partira

    Errance d’à chaque fois

    Dis moi

    Si l’on s’aimera

    Émaner d’un avoir en futur

    L’histoire dessinée sous l’aura

    Dis moi

    Si l’on vivra

    Mirer, et puis à toute allure

    Mourir dans tes bras

    Dis moi

    Si l’on apprendra

    La peur et l’effroi

    L’horreur et l’émoi

    L’ivresse et la joie

    Dis moi

    Si l’on suscitera

    Les rires, les éclats

    L’absence et le désarroi

    Dis moi

    Si seulement l’on connaîtra

    Ce fébrile instant d’autrefois.


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  • Approche! Conte-moi l’heure, dénude moi,

    Élague l’écorce et l’écaille, escadrille

    De désirs, de mots, de plaisirs comme une vrille,

    Enveloppe en volute, embrasse mon émoi.

     

     

    Attrape! Dérobe la seconde et le mois,

    Modèle la mousse, repousse chaque grille

    De maux, de mensonge, de douleur et de trille,

    Évince mon errance, supplie l’âme chamois.

     

     

    Si d’un amoureux élan la peinture vermeille

    M’éclaire et m’exhorte en un ténébreux soleil,

    C’est alors que je danse, - éternelle cadence -,

     

     

    Selon mon ténébreux et funeste reflet,

    Moi, Muse de pierre, de toile, d’élégance,

    Détruite, par l’indigne artiste, d’un soufflet!


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  • J’aurai bientôt l’impression que le mot « sourire » n’existe plus parmi les maux.

    Je ne connais pas son orthographe.

    Je ne connais pas sa définition.

    Il me semble que des années se sont écoulées, tranquillement, inlassablement, depuis qu’une dernière grimace a distendu les muscles de mon visage. Comme si le soleil n’existait plus. Comme si la terre ne tournait plus. Comme si les secondes d’un mortel temps ne s’écoulaient plus. Et déjà, je souffre d’être encore vivante. Le printemps succédera-t-il à l’hiver de mes pensées engourdies? Tourments tempétueux dans mon âme endolorie. Je crois que l’heure d’une nouvelle ère ne sonnera plus, l’eau ne s’écoule plus, la clepsydre se fend. Et l’ombre de ne plus tourner, mais de s’installer au creux de mon cœur dont la froideur raidit peu à peu les membres dont je suis empreintes. Je respire les écumes d’horreur qui émane d’un sang que je fais régulièrement couler, je respire le sérum dénaturé en fumée d’opium, je respire l’éclat d’un nouveau point sur ma peau piquée. Je défaille, il me semble que je défaille. Et je ne comprends plus. Ma vision se trouble, le besoin d’une dose retentit au creux de mon crâne qui se brise à chacun de ces cris. Je refuse. Mais je cède déjà…

     

    J’aurai bientôt l’impression que le mot « sens » n’existe plus parmi les maux.

    Je ne connais pas son orthographe.

    Je ne connais pas sa définition.

    Il me semble que des années se sont écoulées depuis que ma raison s’est égarée, vainement, irrémédiablement. Et je ne crois plus analyser les instants d’un rien quand mon cœur s’acharne à vénérer celles et ceux qui me détruisent peu à peu. Comme une poupée de chiffon déchiquetée malicieusement; mais je ne connais pas même mon rôle.

    Celui de me vider de mes boyaux?

    Celui de déchirer à n’en plus pouvoir?

    Je me vois grandir dans un monde dont le sens s’effrite à chacun des jours qui s’écoulent comme un couteau dans une plaie ouverte. Et si le monde lui-même ne tourne plus, comment la mince vie d’une adolescente qui s’égare peut-elle trouver raison? Les grands s’envolent. Et les petits les précèdent. Je ne connais plus les mots, seulement les maux. Cette pluie en fracture douloureuse sur mes épaules brisées. Le ciel en chaos de désarroi. Les nuages en fardeaux atypiques. Puis-je croire un jour n’être plus que kaléidoscope de mes pensées sans aura? Mais ce manque qui m’agresse, qui me menace, et qui m’assujettit à lui… Je refuse. Mais je cède déjà…

     

     

    J’aurai bientôt l’impression que le mot « bonheur » n’existe plus parmi les maux.

    Je ne connais pas son orthographe.

    Je ne connais pas sa définition.

    Il me semble que des années se sont écoulées depuis que cette écorce vénérable s’est détachée en hurlement de mon corps égratigné. Mon heurt ne sera plus antiseptique, et déjà, la gangrène s’empare de mes plaies, la pourriture et l’odeur de la mort s’empare de tout mon être quand je n’ai plus les moyens de me soigner. Je crois apercevoir sur les draps de mon lit pur et blanc le sang de ma dernière tentative. Et de manière immuable, ce besoin de piqûres, pour me permettre de guérir, disait-on, et toujours cette poudre inhalée entièrement quand sonne l’heure de ne plus dormir, je perds les gélules, et m’effondre.

    Les lapsus se succèdent au son des discussions. Corps rime avec sort. Le sort de ma mort. Pourrir rime avec sourire. Le sourire de mon soupir. Luire rime avec nuire. Nuire pour enfin fuir.

    Je crois ne plus saisir quand commence le bonheur et se termine le malheur depuis que la dose obsède mon corps et mon âme. L’aiguille est en face, et ma respiration saccadée s’arrête l’espace de quelques secondes. Face à moi, elle si petite mais qui suggère sa supériorité sur mon être dénaturé, elle si brillante et exquise qui m’apportera la découverte d’un extase inébranlable, elle si indépendante de ma volonté, mais qui sait être révérée, elle qui m’observe quand mes yeux se ferment. Elle qui m’appelle inlassablement quand mon corps frissonne, la peur, et le froid.

    Elle.

    Je m’y refuse, mais je cède déjà…


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